J’ai testé New World et c’était les montagnes russes
Presque 6 mois après sa sortie le mmorpg d’Amazon Games fait encore couler beaucoup d’encre : entre « succès incroyable » et « release déplorable », une chose est certaine, le premier vrai jeu du géant du net n’a pas laissé indifférent. Testé pendant la bêta puis à sa sortie, je reconnais que New World a une base intéressante à exploiter pour le futur, à condition que la volonté de la boîte de production ne se prenne pas au jeu casse gueule de vouloir à la fois faire plaisir à tout les types de joueurs et transformer son jeu en machine à sous.
Je ne vais pas revenir ici sur toutes les features du jeu, il existe largement assez d’articles à ce sujet sur les sites spécialisés, mais plutôt raconter mon expérience d’ancienne addict du genre.
Août 2021 – En vacances depuis peu et sans plan précis pour ces congés estivaux, l’envie de tester la bêta de New World m’a prise sans prévenir et j’ai lâché les 40 euros requis pour obtenir le sésame des serveurs de test. Je précise que je n’avais absolument pas suivi le développement du jeu et que c’est sans rien connaître de son contenu que je me suis lancée.
Après une création de personnage famélique et plutôt décevante, j’ai enfin posé le pieds sur l’île mystérieuse d’Aeternum où j’ai tâtonné quelques heures avant de prendre vraiment en main la bête. Le gameplay n’est pas spécialement compliqué mais les mécaniques du monde le sont un peu plus, et les quêtes censées les expliquer sont tout de même un peu light question méta. Toutefois, étant en mode « touriste », la simple découverte des différentes armes, des biomes et du craft m’ont permis de passer quelques heures bien sympathiques. J’ai testé la bêta jusqu’au level 25 environ et fait le premier donjon en pick-up : entre les dps qui sautaient partout en balançant tout ce qu’ils avaient sur le moindre mob, le tank qui courait derrière et le heal qui devait transpirer à grosses gouttes, ce fut un joyeux bordel dans la digne tradition des mmorpg. Le donjon lui-même ayant juste le mérite de forcer les joueurs à jouer ensemble et à maitriser leurs classes.
Afin de ne pas me spoiler et/ou me dégoûter trop vite, j’ai stoppé ici mes investigations et attendu patiemment la release alors repoussée au 28 septembre, avec en tête un mmorpg sympathique, pas révolutionnaire mais truffé de bonnes idées. Comme je n’en attendait rien, ce fut une bonne surprise.
Septembre 2021 – Release de New World – Après une journée bien remplie de travail, je me dépêche de rentrer, torche vite fait mon rôle de maman avant de me connecter au précieux sésame pré-téléchargé la veille par précaution. Environ 1h30 plus tard je parviens enfin à créer un personnage sur le serveur de mon choix avant que le jeu ne replante. Après une reconnexion tendue je clic enfin sur le bouton « jouer »…1h30 plus tard je suis toujours en file d’attente.
Philosophe, je lâche l’affaire pour la soirée et décide de retenter ma chance le lendemain. Ca tombe bien, je suis censée sortir plus tôt du travail… Quelle naïveté ! Je ne vais pas ici refaire mon emploi du temps complet du mois qui a suivi, mais disons pour résumer qu’au bout d’un mois, trois perso créés et trois serveurs différents j’ai enfin pu avoir un temps de jeu régulier sur le serveur que je voulais.
Quoiqu’on en dise, cette release a été la pire que j’ai connu en terme de logistique et de réactivité. Une véritable purge qui n’a aucune excuse ni raison valable.
L’île mystérieuse d’Aeternum
Il y a fort fort longtemps dans un monde fort fort lointain….il était une île mystérieuse recelant de trésors et de dangers qui attirait tous les crevards du monde en quête de gloire et de richesse.
Si vous avez déjà pratiqué les release de mmo l’image de dizaines de joueurs se ruant sur la moindre bestiole ou plantouille qui traine vous fera probablement sourire. New World ne fit pas exception et c’est dans un chaos infernal qu’un troupeau effrayant de joueurs s’est rué sur les terres d’Aeternum pillant, tuant et rushant les niveaux comme des damnés. Tout cela pour se retrouver – as usual – niveau max à farmer en boucle les zones élites et les donjons HL.
Pour ma part, rompu aux releases et habituée des ouin-ouin des joueurs qui atteignent le niveau max en une semaine, j’ai pris mon temps. Pour tout dire je ne suis que level 41 de mémoire, je dis bien de mémoire car cela doit faire un mois que je n’ai pas touché le jeu. J’ai fais quelques recherches sur les builds, la méta, les mécaniques de jeu etc… afin d’éviter les erreurs des débuts qui se payent lourdement si l’on est pas un joueur avec un gros temps de jeu, tenté de faire un perso qui ne croiserait pas son jumeau tous les deux mètres (sans succès), optimisé ma récolte dès le début… bref j’étais à fond, motivé et heureuse de découvrir un nouveau mmorpg.
J’ai souhaité monter un healer, ce qui s’est révélé être une purge épouvantable en solo. Certes j’étais incroyablement résistante mais affreusement lente. Je me souviens d’un combat avec un nommé qui m’a pris presque 10 minutes ! Le gars juste avant moi l’ayant explosé en environ 15 secondes… Mon erreur a été de privilégier le up du bâton pour débloquer les sorts de soin et le focus pour augmenter mes heals afin de jouer en groupe, au détriment de ma seconde arme censée m’apporter le dps. Cela m’a rappelé les vieux mmo où pour monter un healer il fallait absolument jouer en duo avec un tank ou un dps. Bon gré mal gré, après quelques session d’up de ma hache j’ai enfin atteint un niveau de dps suffisant pour ne pas passer 5 minutes par mobs, mais rien de folichon non plus.
Au fur et à mesure de ma montée en niveau, l’effet nouveauté s’estompant, la pauvreté d’écriture des quêtes et leur répétitivité ont commencé à émousser mon envie de jouer. C’est mouuuu, c’est nul, c’est sans intérêt : tuer X, fouiller Z, activer Y. Et bis repetita. Le pire étant les suites de quêtes qui vous font faire 15 allers-retours dans la même zone à chaque fois pour valider puis reprendre la suite. Ce n’est quand même pas compliqué d’avoir une validation auto qui vous donne la suite de quête où que vous soyez, surtout pour un jeu de 2021. Et qu’on ne me sorte pas l’argument bidon de l’immersion et du respect de la cohérence. Parce que la c******* là qui m’a fait faire 6 ou 7 allers-retours dans son ancien village pourri pour récupérer ses m***** – genre elle pouvait pas tout me demander d’un coup – dans un jeu immersif et cohérent je lui aurait bourré la g***** à coup de hache et volé ses affaires !
Bref, commençant à sentir la lassitude me gagner, en raison des quêtes no brain, de mon look de clocharde, des mobs identiques et des zones identiques (ok à trois végétaux près), je me décidais enfin à chercher une guilde afin de m’essayer au contenu de groupe. Après tout, je ne m’étais pas tapé 30 levels en healer pour rien, autant que ça serve. Ceci fait j’ai enchainé quelques donjons avec mes nouveaux teammates, pour conclure que bof, ça n’était pas les donjons qui allaient m’apporter un regain massif d’intérêt. C’est brouillon, pleins de trucs gadgets à faire qui n’apportent rien, et en dehors d’un ou deux boss sympa ce ne sont que des packs et des packs de mobs identiques. La palme revenant à l’expédition Pierre d’Etoile (lvl 35 il me semble) avec ses lasers pourris et ses sauts qui requièrent une fluidité que les animations de perso rigides et la latence du jeu rendent cauchemardesques. Ajoutons à cela un intérêt grandement limité puisque les récompenses des boss sont faméliques, ce qui rend le coût d’une clef de donjon bien trop élevé pour la récompense qu’il apporte. On utilise donc la clef offerte avec la quête pour la découverte et on n’y remet plus jamais les pieds. A voir si les récentes mises à jour ont changé la donne….
Finalement c’est le craft qui m’a apporté la meilleure impression. Très complet, fun, et plutôt utile rapidement, moi qui déteste le craft d’habitude j’ai adoré ça. Ceci est sans doute lié au fait que la récolte n’est pas la purge habituelle où il faut se battre pour 2 mines par km2, mais à l’inverse, que la multitude des possibilités (tout ce que l’on voit est récoltable ou presque et on peut monter tous les artisanats en même temps si on le souhaite) permet aux joueurs même les plus casual de ne pas être frustrés. Cela ne signifie pas que ce sera forcément facile ou super rapide, mais au moins que vous n’aurez pas besoin de farmer comme un âne à 2h du mat, de l’alignement des planètes et du sacrifice d’un poulet pour pouvoir crafter un truc.
Concernant le PvP je n’ai pas testé, aussi je ne saurai avoir une opinion dessus. Toutefois de ce que j’en ai vu, lu ou entendu, si sur le papier il semble plutôt intéressant, dans les faits il s’est vite traduit par :
- une quasi absence de PvP sauvage, car sans intérêt et je dirais même qu’aujourd’hui il n’existe de toute façon de manière générale plus assez de joueurs motivés par cet aspect du PvP,
- un monopole total des grosses guildes des serveurs (à leur décharge le PvP de masse de New World n’est clairement pas pensé pour les joueurs casuals)
- une frustration grandissante des autres qui se retrouvent avec un contenu PvP famélique et réclament des arènes et des instances dédiées.
- Sans compter les problèmes d’équilibrages des armes, les bugs à répétition et les exploits de bugs par les joueurs.
Les dernières annonces des dév ne vont d’ailleurs sûrement pas ravir les amateurs puisque c’est le PvE qui va être encore une fois amélioré.
Tout cela a fini par avoir raison de ma motivation, et un soir plus fatiguée qu’un autre je ne me suis pas connectée, le weekend suivant j’ai fais autre chose et petit à petit j’ai fini par oublier le jeu.
New World n’est pas à la hauteur de ses ambitions
Plutôt rafraîchissant dans l’idée et intéressant, le monde d’Aeternum n’en reste pas moins extrêmement générique, ce qui est le revers de médaille inévitable à vouloir coller à un monde et une ambiance qui se veut réaliste (un 17ème siècle alternatif). Cette banalité dans les biomes, les créatures et les personnages a un côté rassurant mais également extrêmement limitant et répétitif. Difficile sur une base comme celle-ci de se permettre tout et n’importe quoi dans le futur au risque d’ébranler la cohérence de l’univers. Car si le tout ne transpire pas l’originalité, on notera tout de même la cohérence de chacun des éléments qui lui donne vie et substance.
New World est joli, on sent une volonté de bien faire, mais l’ensemble est daté que ce soit dans la direction artistique, la création de personnage ou les animations. Tout est très rigide et répétitif et il y a cette latence permanente qui peut être assez vite agaçante.
Question gameplay :
- Le style FPS apporte un léger dynamisme
- L’absence de ciblage apporte un peu de challenge (surtout pour les heal au début)
- On ressent légèrement les effets d’armes lourdes par rapport aux armes légères
- Le fait de pouvoir parer (+ ou – efficacement selon les armes) ou esquiver avec la gestion d’une barre d’endurance est intéressant mais pas vraiment novateur
- Le fait de devoir monter son niveau d’arme en même temps que le niveau de son personnage est à la fois intéressant et punitif si on a envie d’en monter plusieurs.
- Toutefois le gameplay se résume majoritairement à cliquer droit frénétiquement sur sa souris
Nous restons donc dans du déjà-vu et/ou du déjà mieux fait ailleurs.
J’y ai même vu l’influence des Souls ou des Elder Scrolls avec de petites touches ici et là :
- gestion d’une barre d’endurance pour parer ou esquiver
- gestion du poids « en charge » de votre avatar ou de son inventaire sous peine de ne plus pouvoir avancer normalement et de plus pouvoir vous téléporter
- le fait de pouvoir utiliser toutes les armes, de créer votre build et donc votre classe personnelle
- le fait de pouvoir aussi utiliser toutes les armures (légères, moyennes ou lourdes) même en étant un mage par exemple
- les feux de camps que l’on peut installer quasiment partout pour éviter de rez à 50 bornes…
Cela ajoute un peu de sel au gameplay, mais les mécaniques peinent à se transposer en terme de game design car un mmorpg n’est pas un rpg solo, et beaucoup des contraintes liées à ces features font grincer des dents les joueurs qui galèrent notamment entre les déplacements marathoniens et les contraintes de poids et d’inventaires.
Le fait de pouvoir tout faire avec un seul personnage est au final limité dans un univers qui se base sur la trinité tank/heal/dps. Les builds en vogue utilisent tous quasiment les mêmes armes, sorts et caractéristiques, largement soutenu par les problèmes d’équilibrages et de bugs. Rapidement, seuls les builds viables vont s’imposer et le reste tombera dans l’oubli, sauf pour les quelques joueurs qui ne recherchent pas l’optimisation.
L’économie du jeu est également intéressante sur le papier, puisque gérée uniquement par les joueurs qui devront eux-mêmes fixer les règles de leurs cités. Gestion des taxes sur les transactions, sur le craft, sur les maisons… Tout est fixé par la guilde qui possède la ville ou presque. Seules sont fixées par le jeu : le coût des téléportations, la taxe de publication d’une offre à l’hôtel des ventes et l’or obtenu lorsque l’on recycle un item. Mais les problèmes d’équilibrages, l’économie à la ramasse, l’inflation qu’ont connu les serveurs et le coût exorbitant d’entretien des villes… tout cela a largement participé à dégouter les joueurs.
Le PvE est long et sans intérêt narratif, même chose pour le contenu spécifique aux groupes qui nous renvoi 10 ans en arrière en terme de game design et d’innovation. Le PvP demandera énormément de temps de jeu et d’effort pour espérer en faire en masse, mais il semblerait que cet aspect du jeu ne soit plus la priorité d’Amazon Games, ce qui est ironique sachant que New World avait d’abord été annoncé comme un jeu PvP, les features PvE n’ayant été ajoutées que bien plus tard dans le développement.
Mes conclusions sur New World
New World est finalement un mmorpg qui a eu un succès par dépit, par défaut puisqu’il n’y a plus de concurrent sur ce marché en dehors des mastodontes WoW et FFXIV qui sont à abonnement. Tous les autres free2play ou sandbox ayant depuis longtemps atteint leur rythme de croisière sans espoir d’évolution, ou simplement disparus.
Avec rien à se mettre de solide sous la dent depuis quelques années les joueurs ont répondu présent en masse attirés par ce mmorpg un peu old school, un peu nouveau, dans lequel nous pouvons incarner un pirate ou un mousquetaire, ce qui change des traditionnels elfes druides et nains guerriers. L’univers rétro de New World est pour cela très réussi, et les idées apportées à un genre bien poussiéreux, ambitieuses et intéressantes. Mais la logistique et la technique n’a pas suivi et New World a subi en quatre mois d’existence plus de crises et de bugs que je n’en avais jamais connu sur une release.
Les récentes mises à jour ressemblent à des patchs du désespoir et délaissent une fois de plus des joueurs PvP excédés. A ce stade je m’interroge sur la logique des producteurs du jeu : ont-ils vraiment un carnet de route précis qui va améliorer l’expérience de jeu ou s’agit-il plutôt d’un jeu d’action-réaction qui sera mortel sur le moyen/long terme… ? Seul l’avenir nous le dira.
Pour conclure New World est bien l’outsider qu’il était à sa sortie, il ne révolutionnera pas le genre ni ne le marquera de sa patte. Il est efficace et sympathique pour s’occuper et retrouver le plaisir d’arpenter un univers fantastique le temps de monter un avatar et de faire le kéké au level max. Il offre également un bon potentiel au role play et a l’avantage d’offrir un univers légèrement rafraichissant.
Alors pour moins cher qu’un jeu PS5 vous pouvez vous offrir quelques belles heures de jeu sans problème si vous trouvez la guilde qui vous convient, car platiner le jeu en solo risque d’être rapidement frustrant, tant dus aux mécaniques qu’à la difficulté artificielle. Un bon passe-temps.
Scénario/univers : classique, univers rafraichissant, peu d’originalité = 5 | ||
Graphismes : datés, répétitifs, peu d’originalité mais jolis = 5 | ||
Stabilité technique : serveurs instables, latences, nombreux bugs = 2 | ||
Durée de vie/rejouabilité : bonne durée de vie due au genre mmo, mais beaucoup de farm = 7 | ||
Jouabilité/Gameplay : prise en main facile, gameplay classique mais efficace, méta intéressante = 6 | ||
Positionnement face à la concurrence du segment/prise de risque : un bon mélange de déjà vu mais n’apporte rien au genre = 4 | ||
Réponse aux attentes générées : succès inattendu pour un outsider du segment qui n’en attendait pas tant et se trouve, je crois, dépassé par les évènements = 7 | ||
Score final = 5/10 |